Le mouchoir d’instruction N° 2 Démontage, remontage du Fusil Modèle 1874, est un mouchoir exposé au Fort – Don de Monsieur Naquin.
Les mouchoirs militaires sont des témoins des évolutions qui ont suivi la défaite française de 1871. En effet, la loi de 1872 introduit la conscription générale en France et remet en question le système militaire par une incorporation de masse. Au cours de cette période, des nouvelles armes sont mises au service des soldats (révolver 1873, fusil Gras 1874 ou fusil Lebel 1886 … ).
En 1875, le commandant Perrinon, est en garnison à Rouen, dans une région où se fabriquent des mouchoirs ornés de « connaissances utiles ». Il imagine alors un mouchoir rendant accessible les instructions militaires à des soldats souvent analphabètes.
Ces mouchoirs d’instruction, avec leurs textes en français, ont pour but également de renforcer la pratique de la langue française chez des soldats parlant divers patois régionaux. Ce n’est que plus tard, en 1882, que Jules Ferry publiera la loi sur l’enseignement obligatoire et laïque.
Imprimé sur une étoffe résistante de coton de 70 x 80 cm, ce support léger est une sorte de manuel illustré composé de vignettes à la manière des bandes dessinées. Autre fonction, le mouchoir peut servir de foulard ou aussi d’attelle, de pansement pour un membre blessé.
L’atelier de gravure rouennais d’Alfred Buquet réalise alors la composition, les illustrations et les gravures des mouchoirs
Les établissements Ernest Renault (voir ci-dessous) vont les imprimer à l’aide d’une encre très résistante. Les imprimeurs sont implantés à Darnétal, ville limitrophe de Rouen d’où le nom de mouchoir rouennais.
Une circulaire du 29 novembre 1880 du ministre de la Guerre officialise cette création. Il existe 10 mouchoirs et 13 modèles d’instructions validés. Citons par exemple : Démontage remontage du fusil Chassepot modèle 1866 (n°1), Artillerie de Campagne (N° 5) ou encore le Secours aux blessés (N°9).
Chaque mouchoir de la série présente dans la partie centrale une fiche technique de l’arme utilisée par le soldat: Le modèle n° 2 du mouchoir conservé au Fort est consacré au fusil modèle 1874 Gras à cartouche métallique. Voir ci-dessus, le démontage et le remontage du fusil.
Les dessins de 18 situations pour une sentinelle sont présentés sur le mouchoir
Chaque dessin est accompagné par la conduite à tenir dans telle ou telle situation : sentinelle postée sur un toit, sentinelle arrêtant un groupe, sentinelle faisant son rapport, sentinelle observant des traces de pas …
Ci-dessous : sentinelle relevée donnant la consigne, sentinelle recevant les ordres d’un supérieur.
Un rappel du dévouement du chevalier D’Assas, militaire et gentilhomme français du XVIIIe siècle dont la bravoure a été popularisée par Voltaire.
Capitaine au régiment d’Auvergne, sacrifiant sa vie, il aurait sauvé son régiment d’une attaque de l’ennemi, à la veille de la bataille de Clostercamp (1760), en criant « À moi, Auvergne, ce sont les ennemis ! ».
Des dessins des accessoires de l’arme décrite orne les quatre coins du mouchoir d’instruction.
Des marquages du matricule et souvent du régiment sont réalisés à l’aide de tampons à l’encre noire. Ces marquages, sur certains mouchoirs, sont brodés en gros fil rouge.
La France pionnière dans ce concept sera suivie par de nombreux pays (Angleterre, Suède, Russie, Allemagne etc…).
Les mouchoirs d’instruction militaire ont été ensuite remplacés par des manuels d’instruction.
En 1937, l’histoire de ces « carrés » se poursuit dans un tout autre domaine avec la création du premier «carré » Hermès, symbole de prestige et de luxe.